Ils étaient beaux, unis dans un baiser sur le rebord de la falaise ; un baiser qui n'en finissait pas, et rien d'autre qui comptait. Les nuages amassés autour d'eux ne pouvaient pas les inquiéter, ils ne les voyaient pas se rassembler dans l'étrange tourbillon céleste d'un oeil gigantesque qui fronçait sur eux ses sourcils jaloux. Ils n'entendaient pas le tonnerre qui grondait derrière les montagnes d'un Oubli qu'ils affrontaient de leur seule présence, tellement intense et provocante ; ils n'entendaient pas le vent résonner comme dans une cathédrale aux vitraux brisés, tournant autour d'eux comme un serpent qui étouffe sa proie sans qu'elle s'en aperçoive. Ils ne voyaient pas le soleil s'éteindre, pris dans l'entrelacements de leurs lumières épidermiques. Leurs yeux en fentes minces étaient déjà perdus dans des étoiles bien plus lointaines que la jalousie du Temps et de la Tempête...
La poigne du vent se fit plus serrée, les collant l'un contre l'autre sans qu'ils résistent ; elle le voulait et il la voulait. Leurs jambes liées étroitement ne se distinguaient plus, vissées au sol pour n'en plus jamais bouger peut-être. Fléchissant les genoux, elle se pencha en arrière vers le vide tentateur, ses doigts se refèrmèrent sur le foulard qu'il portait au cou et il la suivit. La tourmente sournoise les laissa faire, se cambrer de désir et de vie sur l'herbe d'un surplomb... Le Ciel noir ramassé sur eux les pointait d'un doigt nébuleux et accusateur, et la Tempête riait. La foudre dessinait une vaste spirale dont ils étaient le centre, l'épicentre, le coeur inconscient du Cyclone qui sombrement les couvrait. Elle frissonna, s'aggrippa à lui ; il la retint. L'adrénaline les réchauffait, l'électricité traçait des éclairs bleutés sur leurs peaux collées l'une à l'autre, les liant et les brûlant tour à tour...
Les Cieux craquèrent avant eux ; et la colère électrique fusa sur eux comme un voluptueux tourbillon de lumière, et le Temps mordit leurs corps frémissants. Sous ses crocs venimeux leurs peaux se craquelèrent dans l'effort ; et leurs doigts se lièrent sous l'écorce. Leurs pieds se firent racines, et leurs cheveux emmêlés prirent l'aspect d'un bruissant et unique feuillage aux tons chatoyants d'Automne. Ils prirent la forme d'un arbre aux formes extra-végétales ; mais ni le Temps ni la Tempête ne purent jamais plus les déraciner l'un de l'autre, sur la falaise en surplomb des vagues...
Gatrasz.
histoire d'amour entre deux êtres que rien n'éloignera. bizous là pour toi