• Le [Fruit] Est Dans Le [Verre]...

    (Montage Photo : Gat' from Google Images)


    Vous avez sûrement déjà eu l’occasion de mettre les pieds dans un restaurant asiatique ; pour ma part c’est assez souvent que je pratique ce genre d’exotisme. Ce n’est pas difficile : au bout de ma rue s’ouvrent les
    Portes de l’Orient. Pas moins… Vous y accueille une hôtesse en tout point (à priori) charmante, en kimono et sandales à haut talons ; cette grâce importée du Céleste Empire se courbe jusqu’à terre - j’exagère à peine - et vous laisse gentiment croire que c’est vous qui choisissez la place où vous allez manger. On ne touche pas, non, ça ne se fait pas ; mais on la couv(r)e du regard d’aussi près qu’on peut. Puis on emprunte une succession de petits ponts de bois, dans un jardin luxuriant mais organisé de galets et de palmes artificielles. On dîne sur un îlot, persuadé que personne à des kilomètres ne mange les mêmes plats, ni ne commande au même instant un menu en tout point similaire. Enfin, bon, j’y étais l’autre soir avec un camarade ; j’aime bien y emmener mes invités, c’est un peu…mon petit salon exotique, vous voyez ? Sauf que c’est eux qui font le ménage, et que je paye pour y manger. C’est honnête... En tout cas, je m’y posais devant la carte, serpentant au milieu des apéritifs lorsque intervint mon comparse.

    «
    Dis-donc, fit-il d’un ton de comploteur, tu connais l’histoire de l’image au fond du verre de saké ? »

    Butor ! Bien sûr, je la connaissais ; et à vrai dire, je redoutais qu’il en parle. La Demoiselle aux postures impudiques, révélée par la présence de l’alcool, c’était un peu ma Muse, mon amoureuse ethylo-romantique, ma source d’inspiration spiritueuse. Qu’il veuille la voir aussi, c’était comme une souffrance, un honneur particulier à n’accorder qu’à titre de faveur
    (très) spéciale. Et le pire...c’est que jamais je ne la regardais vraiment. Je me contentais de l’effleurer du regard, la caresser de la pupille, comme une promesse : un jour, je passerais de l’autre côté, et là...

    Mais ce jour, j’avais de la concurrence ; alors je plongeai mes yeux tout droit dans le verre aux parois de céramique, l’air penaud, pour y plaider ma cause. Elle était là ; intime et irrévérencieuse, provocante et en même temps dissimulatrice. A son sourire, je vis qu’elle m’excusait. Pourtant, une chose me chagrinait : c’est qu’évidemment, si je la voyais par cet angle, mon ami la voyait par l’autre ! De jalousie je vidai mon godet d’un coup, histoire de fermer la fenêtre aux fantasmes. Un court instant, et puis je me hâtai d’en remettre un. La séparation, déjà, m’était insupportable... Elle était toujours là. Mais pas toute seule ! Oui, le temps que je siffle mon premier saké, elle s’était fait rejoindre par une consœur. Presque une jumelle ; et elles me regardaient, l’air mutin, genre : «
    Pas un mot ! On est là juste pour toi ». Coup d’œil à mon copain : pour sûr, il n’avait pas, lui, ce don de double vue. Grisé, je recommençai : gagné ! Cette fois-ci, elle étaient quatre ! Et ça allait ainsi de suite, à mesure que je descendais la bouteille il y en avait toujours deux fois plus. Je voyais bien mon compère, de l’autre côté de la table en bambou, me fixer d’un air suspicieux ; il devait se demander pourquoi je picolais tout à coup. S’interroger. Grand bien lui fasse ! Pour ma part, je n’étais plus avec lui, et je n’y serais plus jamais : j’avais tout un harem, là, au fond de mon verre ; et d’ici la fin de la bouteille, pas de doute, j’y aurai définitivement sombré.

    Honorables Salutations...


    Gatrasz.


  • Commentaires

    1
    Samedi 20 Mars 2010 à 16:08
    Et je suis sûr...
    ... que jamais tu n'avais eu autant envie de toucher le fond ! :~)
    2
    Samedi 20 Mars 2010 à 18:27
    @Tant-Bourrin :
    ...ouais, t'as raison, 'au fond' ; il est temps d'aller nager avec les sirènes...aux écailles vert-bouteille ! ;)
    3
    Dimanche 21 Mars 2010 à 10:25
    jamais seul.
    Sur ce coup là tu n'as pas été saké )
    4
    Dimanche 21 Mars 2010 à 10:27
    Tchin Tchin .
    J'ajoute : Un verre ça va, trois verres : bonjour les Geishas !
    5
    Dimanche 21 Mars 2010 à 11:17
    @Andiamo :
    ...je ne sais pas si l'expression 'cul-sec' est d'actualité^! ;)
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