• Laundry Music...

    (Photo : Gat'. 2007)

    J'avais mis la machine en marche, et je regardais le tambour tourner, tourner, assis contre la vitre froide, un matin de janvier. Je somnolais, bercé par le mouvement de mes chemises et de mes chaussettes lorsque, « knock, knock », on frappa contre mon oreille à travers le carreau. Je sursautai : c'était Elle. Avec sa jupe froissée qui ne devait pas souvent tourner à 60°C dans l'eau savonneuse ; sa veste à franges arachnéenne sur un chemisier noir dentelé par l'usage et ses cheveux tressés, floconneux. Sa peau claire rendue translucide par le froid, et son haleine diaphane qui se changeait en fines volutes blanches pour s'élever vers le ciel. Mes mains contre les siennes à travers la vitre, je la regardais immobile, la tête penchée sur le côté ; elle souriait.

    D'un coup, je me retrouvai dehors, les poings dans les poches de mon blouson, marchant derrière elle qui gambadait gaiement sur le trottoir. Je la suivis d'intersections en passages cloutés, d'escaliers d'immeubles en ruelles pavées. Nous atteignîmes enfin son repaire ; elle descendit les marches d'une station de métro qui, depuis longtemps, n'appartenait plus à la R.A.T.P... Je m'infiltrai comme elle entre deux
    murs sales et carrelés, traversai un parking souterrain changé en obscur terrain de camping pour junkies et paumés. Chacun son emplacement avec sa couverture, et son réchaud à gaz chauffant on-ne-sait-quoi... Elle enjambait des corps allongés, des matelas crasseux, contournait une tente à l'armature de ficelle... C'était son jardin, son H.L.M. à l'horizontale, qu'elle semblait connaître par cœur : chaque voisin, chaque squatteur. Elle habitait dans ce qui avait dû être une cave d'immeuble aux murs à présent crevés, derrière un couple de lave-linges dépareillés mais apparemment fonctionnels. Après tout, je m'étais peut-être bien trompé pour la jupe... Dans son réduit, elle me fit du thé - ce qu'elle mélangea aux feuilles, bien malin qui saurait le dire - que je bus engoncé dans le tas de chiffons qui lui faisait office de banquette. Pelotonnée contre moi, comme un chat, elle se contentait de humer son bol ou le mien, et parfois d'y tremper ses lèvres. Je sirotai mon thé aussi lentement que je pus, immobile, me réchauffant près d'elle...

    Quant je partis, elle dormait au milieu des chiffons ; j'étendis sur elle la vieille veste à franges, mince couverture kaki sur ses frêles épaules blanches. Mon linge finissait d'être essoré quand je retrouvai ma propre laverie de quartier ; je lançai le programme de séchage, m'assis à nouveau sur les sièges en plastique, tout contre la vitre qui donnait sur la rue, et je m'endormis.

    Gatrasz.


  • Commentaires

    1
    Lundi 27 Octobre 2008 à 09:48
    toc toc
    bonjour toi. tendres bizous là
    2
    Lundi 27 Octobre 2008 à 10:18
    Avant de partir
    Un amical salut (ça faisait longtemps) à Gatrasz, le talentueux. Bonne journée. ;c)
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    3
    Andiamo
    Lundi 27 Octobre 2008 à 16:24
    Le lave-linge
    Le sujet préoccupant, ormis le fait que ce soit très bien écrit, est-ce-que la machine à laver est une : "LAVO 1200 SPEED" à chargement frontal ?
    4
    Mardi 28 Octobre 2008 à 14:19
    :-))
    Haaaaaaa Gat'.. ca fait 1000 ans !
    5
    Mercredi 29 Octobre 2008 à 15:44
    Little.........
    Je découvre ce blog...Avec tendresse..
    6
    Mercredi 29 Octobre 2008 à 17:13
    machine à laver ?
    oh une histoire de machines à laver... comme cela me semble ésotérique que quelqu'un d'autre s'intéresse à cette merveille de l'ingéniosité humaine... *soupirs* on dirait bien, Andiamo, des LAVO1200Speed (mais ancienne génération, sans l'option wifi)
    7
    Vendredi 31 Octobre 2008 à 15:56
    C'est clair, Antenor...
    ...j'adore ces bêtes à tambour ; pour moi, elles ont toujours eu quelque chose...d'érotique. Surtout celles des laveries. Si, si... ;) @Leslie : bin, b'jour ! @Lulu : me revoici ! Te revoilà ? @Andiamo : je sais pas, je n'ai pas oser m'approcher^^ @Arawak : Salut, amical et doué visiteur-dessinateur ! @MTA : coucou, bizous...
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