L'autre jour, je papotais avec mon ami Antech' , en sirotant un jus de goyave en terrasse (tout ce qu'il y a de plus rafraîchissant en cette saison pré-estivale).
Du vent dans les cheveux et des abeilles sur nos verres, nous parlions 'maison'. Faut dire, il vient juste d'emménager, Antech' , et il a toujours des théories intéressantes (ou ébouriffantes, c'est selon) :
"Tu sais, me dit-il en reposant son verre, les maisons aussi ont une âme...
-Une âme ? Ben voyons...et tu vas me dire qu'elles peuvent tomber amoureuses aussi ?
-Je ne plaisante pas, protesta t-il de cette voix un peu caverneuse qu'il prend quand il est avec des amis ; les maisons, on les néglige trop. Elles sont comme des enfants...
Il but une gorgée de son diabolo-grenadine, puis continua :
-Vois comme elles sont conçues, avec amour ; les jeunes mariés dessinent en rêvant leurs futurs contours comme ils regardent les échographies. "Regarde, ici c'est la cuisine...oh, une jolie petite chambre d'amis...et là, ce petit escalier, comme c'est mignon !"
Je hochai la tête ; ses paroles sont toujours empreintes d'un certain cynisme, c'est d'accord, mais il n'empêche qu'il avait raison, sur ce coup. J'avalai pensivement une gorgée de mon jus de goyave.
-Et puis après
, poursuivit mon pote Antech' , ils emménagent. Et ils font des gamins, la vie est belle, tout le monde est heureux. Et on commence à s'habituer à la maison, on se sert d'elle et puis on l'oublie...
-Mais...tu crois qu'elles s'en rendent compte ?
-Bien sûr ! C'est comme un être humain, une maison ! Il y en a même qui sont jalouses. Rappelle-toi celle qui s'est jetée un jour contre le fils de Verlaine, tiens.
-Oui, je me souviens ; à l'époque, on avait cherché à étouffer l'affaire, prétendu que le poète était violent et alcoolique... Sale histoire."
Nous restâmes un moment songeurs, à méditer sur l'étrange profondeur de ces révélations ; toutes ces vérités qu'on ignore, par bêtise ou par manque d'imagination... Puis, Antech' s'est levé et il a fini son verre ; il allait être 17 heures, et je crois bien (malgré ses dénégations gênées) qu'il avait rendez-vous avec une théière, dans son cher petit salon...
là mais j'ai de l'herbe dans le cerveau il suit pas