• [Photo : Gat'2007]


    Nous revenions avec la Miss d’un retour aux sources bien mérité, un stage
    mémoire et rock’n’roll avec des guitares et du chianti, des phyllosilicates et un homme dindon (pas moins). Rien qui prédispose aux visions prophétiques ni aux nausées en chemin de fer, en somme ; et nous cheminions, cruciverbiste et vagabond zensunni dans l’âme. Une salade et un sandwich plus tard, nous avions franchi 500 km et le retour se confirmait sans anicroche, avec une dizaine de minutes d’avance - même dans la voiture de queue. Dix minutes en tout point spéciales, on allait vite pouvoir s’en assurer. Il a fallu qu’on prenne du retard à ramasser nos affaires, on avait dormi un peu plus que nécessaire et le Corail attendait sagement, vide à notre exception notable. Nous descendîmes sur le quai, et là, nous frappant au débotté comme le plomb un pigeon voyageur...le silence. Mademoiselle, qui est musicienne, l’attrape au vol et me le tend : c’est vrai, pas une voix, pas un bruit de machine ou de klaxon nocturne. Quelque chose comme un vide entre les enchaînements sonores de la symphonie urbaine ; et l’étrange constatation que non, il n’était pas tout à fait pur, ce silence. Il y avait un petit truc, un Adaggio for Strings qui courait sur les quais comme pour nous signifier l’instant sacré de calme plat, la première bouffée d’air frais juste après la survenue brutale de l’Apocalypse (elle ne peut arriver doucement, sournoisement, ça ne serait pas rock’n’roll).

    On se regarde tous les deux, on se dit qu’on est les deux derniers et que pèse sur nos épaules le lourd fardeau de repeupler la Terre ; enfin, pas trop vite, on est très bien à deux
    avec le chat entre nous pour amortir les petits heurts du quotidien. Plus jamais de loyer à payer, je me dis ; pas de médecin mais bon, on n’a qu’à pas tomber malade aussi, tant qu’à faire. Elle me fait remarquer que c’est quand même un peu glauque, le coup de la musique classique après que tout le monde soit mort : un bon gros Heavy Metal, pour fêter ça, ce serait mieux. Personnellement, je préfèrerais un joli petit blues (parce que le Heavy ça se danse et là, voyez-vous, le voyage en train m’a un peu fatigué). T’es sûr qu’on s’est pas trompé de gare ? Je me le demande ; on a du descendre du mauvais côté, rater d’un chouïa la bonne dimension, et nous sommes dans un univers parallèle. A côté de nos pompes, sur une autre longueur d’onde. Une autre vibration... Nous errons dans les couloirs souterrains, à l’affut ; personne. C’est qu’on se mettrait presque à y croire !

    Et puis,
    vlam, l’escalator qui se met en marche en nous voyant : ça fiche un coup, y’a aussi une machine qui a survécu à la fin des temps ! Nous l’empruntons, prudemment, flairant le piège ; tout à coup, tombant sur nous sans prévenir, le temps nous rattrape et nous voici à l’heure, revoilà les avertisseurs et les cris d’enfants, les gens qui nous bousculent et s’en vont sans s’excuser. Un brin de déception, désillusion presque amère mais pas tout à fait. On avait tout simplement dix minutes d’avance sur l’horaire du reste du monde : le décor n’était pas encore en place, les figurants étaient pile à l’heure et le train, pour une fois, un peu trop rapide. Voilà tout. Fin de l'histoire... Maintenant je vous laisse, j’ai un très, très bon CD - 4 pistes à écouter.

    (et ne faîtes pas attention aux incohérences de temps, c'est juste pour faire plus intemporel)


    Gatrasz.


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